Life on Mars

Benjamin L. Aman, Marion Auburtin, Alexandre et Florentine Lamarche-Ovize et Bettina Samson
Commissaire d’exposition Juliette Fontaine

Exposition du 16 mars au 17 avril 2019
Dans un appartement de la Maladrerie
3, allée Gustave Courbet – 93300 Aubervilliers

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Extrait du dossier de presse

Life on Mars. Pour le titre de cette nouvelle exposition du Centre d’Arts plastiques d’Aubervilliers, le point d’interrogation de la chanson de David Bowie a été retiré. Il n’est pas interrogatif, non pas parce que nous avons des réponses, mais plutôt parce que nous restons ouverts à leurs potentialités multiples. Les artistes réunis ici partagent très clairement un goût prononcé pour l’alternative, l’hypothèse, le risque d’une éventuelle inexactitude, voire d’une erreur. À moins que ce ne soit aussi l’accueil toujours possible d’une certaine errance, avec parfois les figures équilibristes et les acrobaties contorsionnistes du paradoxe. Ainsi, nous sommes loin de la chanson londonienne, des lueurs sinistres et mélancoliques du monde de « la fille aux cheveux ternes » cherchant une image qui lui ressemble dans le reflet de son impérieuse solitude. Et qui pour ne pas se consumer, ouvre un horizon radical, rêvant silencieusement d’une possibilité d’existence sur Mars. Il y a toutefois au départ une conjonction conceptuelle, assez hasardeuse et finalement poétique, entre le titre Life on Mars ? du magnifique album Hunky Dory, et le troisième mois du calendrier – parfois emprunt de superstition car nommé « le mois des génies et des fous » – cette saison annonçant tout à la fois l’aventure excitante d’une nouvelle exposition et les promesses scintillantes du printemps.

Cette exposition n’a pas de thématique, ni de fil rouge à proprement parler. Elle ne regroupe pas des artistes autour de la tellurique planète rouge et de tous les fantasmes qu’elle suppose tels que sa colonisation, ou ses hypothétiques habitants aux yeux écarquillés, aux paupières décousues. Parfois, dans les œuvres des artistes choisis, apparaissent des présences, des étrangetés, des fantômes, des esquisses d’utopies, des références à la science-fiction, des objets dont l’improbabilité serait digne de la non-fonctionnalité de la tasse de thé du Lièvre de Mars dans Lewis Carroll. On y trouve même des images récentes de la NASA. Mais on ne trouvera aucune nouvelle interprétation de la conquête spatiale inaugurée par Jules Verne et incarnée dans La Guerre des mondes. Aucun monstre entomologique, aucun reptilien luminescent, aucun être repoussant doté d’une tête démesurée et de tentacules, aucun petit bonhomme vert grisâtre. Aucun alien. Peut-être quelques mutants.

L’axe partagé ici est très clairement la notion de territoire, et en particulier celui de la Maladrerie. Tous les artistes ont leur atelier dans le quartier. Le match est à domicile. Chaque artiste s’avance avec une nette singularité à mettre en regard avec celle de l’autre, voire de la mettre en tension dans un même espace d’exposition. Dès le départ, le choix du CAPA de créer des expositions en appartement est un défi qui questionne en soi ce que peut-être une exposition. À l’aune de cette démarche, l’expérience que constitue Life on Mars est d’autant plus expérimentale du point de vue de son montage, que les univers de chacun des cinq artistes sont assez différents. Si on doit faire émerger un autre point commun entre eux, c’est l’amitié qu’ils se portent. Ce qui pourrait sembler anecdotique mais qui ne l’est sûrement pas quand il s’agit de s’exposer dans un même lieu avec des originalités si fortement dessinées, et de questionner peut-être, par là même, l’altérité.

Juliette Fontaine, janvier 2019

Photographies © Thomas Guyenet 2019.